22e Journée du Sommeil Protégeons le sommeil de nos enfants
A l’occasion de la 22ème Journée du Sommeil, l’INSV a mené une grande enquête sur le sommeil des enfants et de leurs parents, en partenariat avec le groupe MGEN. Covid, guerre en Ukraine, il est d’autant plus nécessaire de conseiller et de soutenir les parents pour protéger leur sommeil et celui de leurs enfants. L’enquête INSV/MGEN 2022 montre une prise de conscience accrue des parents sur l’importance du sommeil pour eux-mêmes ou pour leurs enfants, même si certains comportements restent à améliorer. Les spécialistes invitent les parents à suivre leurs recommandations que ce soit pour la qualité des interactions, la gestion des écrans, les conditions d’endormissement, la durée et la régularité du sommeil de leurs enfants.
« Le sommeil fait partie des thèmes prioritaires des actions de prévention de la MGEN. La mutuelle organise des conférences dédiées dans ses 102 sections départementales où nos adhérents peuvent échanger avec des spécialistes. En 2021, plus de 16 000 agents de la fonction publique ont bénéficié d’accompagnements, d’ateliers et de formations en prévention santé avec la MGEN, majoritairement dans le secteur de l’éducation. En 2022, l’accent sera mis sur les troubles liés à l’insomnie pour mieux accompagner nos adhérents », précise Mélusine Harlé, directrice de la prévention MGEN.
La 22ème Journée du sommeil est aussi l’occasion de rappeler que si le sommeil est une affaire personnelle, propre à chaque famille, il concerne aussi la société dans son ensemble : école, professionnels de santé, associations et pouvoirs publics.
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Des interactions fréquentes entre les troubles du sommeil parents/enfants dans les foyers
Les parents présentent plus fréquemment un trouble du sommeil 56% (66% dans le cas de familles monoparentales) lorsque leur enfant en a un. À l’inverse, lorsque leurs parents en souffrent, les enfants ont un peu plus souvent un trouble du sommeil (1/3 contre 24 %), principalement des cauchemars récurrents (7%) et des ronflements (6%). « Il ne faut pas hésiter à en parler avec son médecin » recommande le Docteur Marc Rey. « En ce qui concerne les ronflements, avant de s’inquiéter, les parents doivent vérifier s’il répond à trois critères : fréquence (plus de 3 nuits par semaine), durée (plus de 3 mois), intensité (il doit être audible porte fermée). Auquel cas il est conseillé de consulter pour recherche un éventuel syndrome d’apnées du sommeil. » conseille la Professeure Patricia Franco.
Une présence excessive d’écrans qui est décidément délétère pour le sommeil de l’enfant
L’enquête souligne une consommation massive d’écrans chez les enfants (87%) même très jeunes (66 % chez les petits de 6 mois à 3 ans). Si 80% des parents rapportent avoir pris des mesures pour encadrer l’usage des écrans mais l’enquête montre que 55 % des enfants passent plus d’une heure sur écran après 17h en semaine, avec un impact sur leur durée de sommeil ce qui s’accompagne de plus de fatigue le matin au réveil. « Ces données ne sont pas rassurantes car le lien entre l’exposition aux écrans après 17h dans la chambre et la dégradation de la qualité du sommeil avec risque d’apparition d’un syndrome d’hyperactivité chez l’enfant a en effet été mis en évidence » juge Patricia Franco. L’enquête suggère aussi que la majorité des parents regardent les écrans dès le matin, après le travail en fin de journée et 60 % le soir au lit. On ne peut donc écarter que pour certains d’entre eux, les écrans fassent partie des rituels de sommeil.
Les écrans dans la chambre sont à proscrire
Lorsque, dans 11 % des cas, l’enfant s’endort avec un écran allumé dans la chambre, son temps d’endormissement est alors augmenté de 18 minutes en moyenne (48 min. contre 30 min.), ce qui multiplie par deux les troubles du sommeil (49 % contre 24 % au global) sans compter les risques de réveils nocturnes.
Un temps de sommeil insuffisant et pas assez régulier chez les enfants
Selon l’enquête, beaucoup de parents sont conscients que leurs enfants ne dorment peut-être pas assez.
Et pour cause, commente Patricia Franco, « Les enfants se couchent après 21 heures, 38 % en semaine et 67 % le week-end, alors qu’ils ont tout au plus 10 ans. On observe déjà un décalage de phase le week-end chez ces enfants. Ils se lèvent plus tard, se couchent plus tard en fin de semaine alors qu’à la différence des adolescents, cela ne correspond chez eux à aucun besoin physiologique », déplore-t-elle. « 52% des enfants et 45% des moins de 3 ans ont des horaires irréguliers et les durées de sommeil en fonction de l’âge des enfants ne sont pas respectées, ce qui est contraire à toutes les recommandations », regrette aussi Patricia Franco.
Les parents sont conscients de l’impact du manque de sommeil chez l’enfant, en priorité sur l’attention pour (65%), sur les apprentissages (50%), difficulté à maitriser ses émotions (48%), accès de colère (44%).
Selon les études longitudinales, Elfe et Eden notamment, la dette de sommeil et/ou des décalages de phase s’accompagnent effectivement d’un risque de troubles cognitifs, de l’humeur et du comportement mais aussi de surcharge pondérale, apnée du sommeil, problèmes métaboliques. Un sommeil en quantité suffisante est aussi nécessaire à une bonne croissance.
L’aide à la parentalité : le facteur clef pour un bon sommeil des enfants
Les parents peuvent avoir besoin d’aide pour leur propre sommeil, pour apporter à leur enfant le climat de sécurité, de lâcher-prise dont il a besoin pour dormir. « Lorsqu’on analyse le sommeil de l’enfant, on a trop souvent tendance à le sortir du milieu familial. » ajoute Marie-Rose Moro, pédopsychiatre, directrice de La Maison de Solenn « les parents doivent être considérés comme de vrais partenaires. Il faut soutenir leurs compétences. » Heureusement, le nombre de professionnels de la santé et du soin formés à la médecine du sommeil ne cesse de croître. « De même, les actions dédiées au sommeil se multiplient à école, un lieu privilégié pour l’éducation au bon sommeil car elle regroupe toutes les populations, quel que soit le niveau socioéconomique» précise la Professeure Stéphanie Mazza, Neuropsychologue, Chercheuse au Laboratoire RESHAPE, Université Lyon 1, Membre du Conseil Scientifique de l’Education Nationale CSEN.
« Si une bonne éducation au sommeil chez l’enfant est importante, de la même façon il est nécessaire de poursuivre le dialogue avec les ados sur cet aspect de leur vie » recommande la Professeure Marie-Rose Moro car à l’adolescence, on observe souvent une continuité avec les habitudes de sommeil établies durant l’enfance. Ainsi conclut, le docteur Marc Rey : « L’enquête INSV/MGEN 2022 est utile pour continuer à ajuster les actions qui s’imposent pour le sommeil des jeunes. »
Protéger le sommeil des enfants en période de crise
Les recommandations du docteur Marie-Françoise Vecchierini, neuro-psychiatre, membre du Conseil Scientifique de l’INSV :
« En période de crise, comme actuellement et depuis plus de 2 ans, s’endormir peut prendre davantage de temps, les éveils nocturnes survenir plus souvent, de même que les rêves anxiogènes et de cauchemars. Les émotions dans la journée sont en effet transformées et retraduites dans la vie nocturne.
Les enfants sont tout à fait conscients de ce qui se passe dans leur environnement et perçoivent ce que leurs parents ressentent. Leurs parents ont, en effet, leur propre représentation mentale des événements ce qui peut modifier leurs comportements habituels. Ces changements peuvent provoquer une insécurité pour l’enfant ».
Or « les études récentes ont montré une corrélation entre le stress des mères et des enfants avec une interaction entre leurs ressentis et comportements, lesquels sont intimement liés aux modifications du sommeil. Ainsi, plus la qualité du sommeil est impactée, moins bonne est la relation entre les parents et leurs enfants ».
Voici quelques conseils à adopter en fonction de l’âge de l’enfant :
• Prendre de la distance avec l’angoisse et en parler, calmement, surtout si l’enfant le demande.
• Plus l’heure du coucher approche, plus l’enfant est jeune, plus il est nécessaire de l’éloigner des écrans de sources de stress, querelles, images et propos traumatisants.
• Parler de l’événement de la façon la plus positive et réconfortante possible à l’enfant, participe à l’en protéger. Par ex. « Ces personnes fuient leur pays mais on va les accueillir ».
• Privilégier les rituels (lecture d’une histoire) et routines du coucher, dans une atmosphère de calme et d’affection et mieux ils se porteront.
• Amener l’enfant à faire de l’exercice physique peut contribuer à améliorer sa détresse, le détourner des conditions négatives qu’il est en train de vivre. Sans compter que cela est un remède au temps passé devant les écrans.
Pour les parents :
• S’informer mais avec réserve en limitant la durée d’exposition aux informations traumatisantes.
• Maintenir un style de vie régulier, le plus habituel possible.
• Relativiser, prendre du recul et maintenir des rythmes de sommeil réguliers.
• Réguler ses propres émotions, gérer son anxiété (s’aider de relaxation...).
• Éviter de partager ses émotions si elles sont négatives.
• Plus l’adulte est angoissé, plus l’enfant va avoir du mal à bien dormir.
• Plus l’enfant se sent en sécurité et rassuré, mieux il dort et moins l’adulte se stresse.
Enquête OpinionWay menée du 10 au 17 janvier 2022 auprès de 1015 personnes, âgées de 18 ans à 65 ans. Questionnaire auto-administré en ligne sur système CAWI et selon la méthode des quotas, au regard des critères de région et de CSP. Au sein de cet échantillon national représentatif des parents d’enfants entre 6 mois et 10 ans, 30% étaient âgés de moins de 35 ans et 70% de 35-64 ans.
Expert
Mélusine Harlé
Directrice de la prévention
Mélusine Harlé est directrice de la prévention MGEN depuis septembre 2020. Elle travaille depuis plus de 20 ans sur les sujets d’innovation sociale, de santé e